Le mensonge prend l’ascenseur, la vérité prend l’escalier… Mais elle reste parfois au sous-sol !

Le 17/08/2024 0

Article du 17 août 2024

Quelques semaines sans article de blog, ça fait du bien. J’en ai un peu marre parfois de m’indigner : je ne lis pas moins la presse, mais je laisse passer. Cela me fait des vacances, cela me fait du bien. Sans doute aussi à mes quelques lecteurs et lectrices à qui je fous un peu la paix, parce qu’être toujours tiré par la manche, ça fatigue aussi, j’imagine ! En mai, j’ai écrit un livre qui, s’il est un jour édité, s’appellera La démocratie globalitaire. Gouverner par la peur. J’ai pu y mettre noir sur blanc et de manière vraiment circonstanciée tout ce qui ne me va pas dans les rapports entre Pouvoir, médias, science et citoyens. Un bel exutoire personnel de 230 pages, illustré de trois thématiques : Covid, crise climatique, Russie.

Au fond ce qui m’indigne depuis que j’ai commencé à écrire ces petites histoires, c’est toujours la même chose : la manière dont on nous raconte des histoires. Personnellement, j’aime bien en raconter et en lire, mais la fiction doit s’afficher comme telle et ne pas chercher à se donner pour vérité, sauf bien sûr quand on est dans l’exercice romanesque. Mais là, les choses sont claires ! Le lecteur sait qu’on lui propose un mentir vrai, sauf s’il s’appelle Don Quichotte et pense encore qu’il y a des princesses à libérer prisonnières dans des tours… Je dois avoir un côté un peu Don Quichotte car je pense encore qu’il y a des combats à mener alors que la cause est peut-être déjà perdue. Mais tant pis !

Je reviens ici de manière un peu générale sur cette question de l’information, car elle est le nerf de la guerre en démocratie : avec la concentration capitalistique des médias entre les mains de quelques-uns qui les utilisent pour imposer une vision du monde qui sert leurs intérêts politiques et économiques, les citoyens me semblent soumis à des visions du monde de plus en plus cohérentes, sans faille, et qui ressemblent de plus en plus à des histoires auxquelles il s’agit de faire adhérer. Pour cela, tous les détails non conformes (informations divergentes) doivent être écartés ou niés. C’est ce que j’analyse dans mon livre en essayant de montrer comment des espaces d’information (les médias) sont devenus des espaces de persuasion. Le journaliste se fait prédicateur. Le journaliste se fait moraliste. Le journaliste ne va plus chercher l’information pour la livrer au citoyen qui la mettra en cohérence avec d’autres pour se faire son opinion : il dit ce qu’il faut penser. Quel que soit le sujet désormais, l’information est incluse dans une grille de lecture bien construite, bien cohérente et toute information non congruente est écartée, volontairement. Ou fact-checkée quand elle est déjà publique afin de dire « Non non non, ce n’est pas du tout ce que vous croyez ! ». Je vous invite à un petit tour d’horizon, entre ascenseur, escalier et caves !

1. Le mensonge prend l’ascenseur

Petit rappel Russie : quand le gazoduc Nord stream a été saboté, l’une des thèses à la fois les plus loufoques et les plus présentes sur les plateaux TV était que la Russie était derrière. En se coupant volontairement un bras, elle montrait de quoi elle était capable : de tout ! Même des choses les plus absurdes en apparence ! Alors il fallait vraiment la craindre et se préparer au pire. Pendant des jours, on a forgé l’opinion sur ce thème. Rares étaient ceux qui rappelaient, dans des médias alternatifs et ici-même, que Biden avait promis qu’il trouverait un moyen pour que Nord Stream cesse, en restant allusif. https://twitter.com/TaraBull808/status/1574725785566314497. Voir aussi mon article de blog https://informations-covid.e-monsite.com/blog/strategie-du-choc-et-propagande-2.html

Mais non, il fallait regarder du côté de la Russie.

Petit rappel Covid : le vaccin allait définitivement empêcher d’attraper la maladie. On était sauvés. Quand ce premier mensonge a eu fini de prendre l’ascenseur et que la vérité est arrivée par l’escalier, on en a eu un second : il stoppait la transmission, et donc il était absolument nécessaire pour le bien public de mettre en place des passes qui diraient qui est vacciné et peut aller au restaurant et qui ne l’est pas et doit se retirer de toute vie sociale. Quand il a été évident qu’il ne stoppait pas la transmission non plus, la position de repli de la « vérité » a été : « D’accord, il n’empêche ni d’attraper le covid ni de transmettre, mais il empêche les formes graves ». On était déjà aux temps d’Omicron, sans plus vraiment de forme grave, alors difficile de dire si ce vaccin avait vraiment cette efficacité. Mais admettons. Puis une nouvelle « vérité » a pris l’ascenseur, tout aussi indémontrable : le vaccin avait sauvé des  millions de vie. Pour Euronews, en janvier 2024, c’est le flou total.

 https://fr.euronews.com/sante/2024/01/16/les-vaccins-covid-auraient-sauve-au-moins-14-million-de-vies-en-europe-selon-loms

Le lien ci-dessus affiche 14 millions de vie sauvées. Mais le début de l’article parle de 4 millions :

« Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), sans les vaccins COVID-19, le nombre cumulé de décès en Europe aurait été d'environ 4 millions. »

Trois paragraphes plus loin, c’est un autre chiffre encore :

« Le nombre cumulé de décès dans la région européenne, qui s'élève actuellement à 2,5 millions, aurait pu atteindre près de 4 millions sans les vaccins, précise l'OMS. "Il suffit de penser aux 1,4 million de personnes, âgées pour la plupart, qui sont toujours là pour profiter de la vie avec leurs proches parce qu'elles ont pris la décision vitale de se faire vacciner contre le COVID-19", déclare le docteur Hans Kluge, directeur régional de l'OMS pour l'Europe. "C'est le pouvoir des vaccins. Les preuves sont irréfutables", ajoute-t-il.

Alors 14 millions, 4 millions ou 1,4 million (chiffre repris par le titre de l’article en fait) ? Peu importe au fond : il s’agit de persuader, de faire passer un message, pas réellement d’informer. Le 24 janvier 2022, deux ans avant donc, France Info, parlait lui de 6 millions de vies déjà sauvées en Europe : https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/vaccin/covid-le-vaccin-aurait-sauve-20-millions-de-vies_5218870.html

« "Il y a eu près de 20 millions de vies sauvées en 2021 grâce à la vaccination et près de six millions rien qu’en Europe", affirme Damien Mascret, en s’appuyant sur les chiffres de l’Imperial College de Londres (Royaume-Uni). L’université s’est appuyée sur les chiffres potentiels de surmortalité observée si le vaccin n’avait pas été trouvé. »

Donc 6 millions déjà sauvées en 2022, mais 1,4 « seulement » en 2024 ?

2. La vérité prend l’escalier

Il faut du temps mais parfois, la vérité émerge.

Ces jours-ci, l’Allemagne a lancé un mandat d’arrêt international contre un des six Ukrainiens directement impliqués dans le sabotage. Pour le Wall Street Journal qui a, depuis des mois, reconstitué l’écheveau, les plus hauts niveaux de l’État ukrainien sont impliqués et la CIA au courant, les responsabilités exactes restant à déterminer. https://www.rts.ch/info/monde/2024/article/le-sabotage-de-nord-stream-valide-au-plus-haut-niveau-ukrainien-selon-le-wall-street-journal-28599850.html

La vérité continue à se frayer un chemin. Mais elle arrive tard. Trop tard, parce que l’opinion a eu le temps de se forger et qu’il est très difficile ensuite de revenir sur des représentations très fortement ancrées. Le mensonge venait conforter une grille de lecture Ukraine et USA, pays amis, Russie ennemi ; les début de vérité qui arrivent n’y changeront plus rien.

Pourtant les implications de cette nouvelle devraient être politiquement très importantes : l’Allemagne a bel et bien été la cible d’un attentat par un pays « ami » (Ukraine) avec la complicité d’un membre de l’OTAN (USA). Son économie en a été totalement bouleversée, sa dépendance à l’égard des USA considérablement renforcée. Les USA ont réussi ensuite à nous vendre ce gaz de schiste tant décrié, cher et écologiquement catastrophique. Politiquement, un pas de plus vers une guerre dure a alors été franchi, les possibilités de retour en arrière et de négociation de paix ont été empêchées.

Que faisons-nous de cette information aujourd’hui ? Il y a fort à parier que l’on n’en fera rien. Les politiques français, italiens, allemands, etc. qui ont eu à subir les conséquences de cet attentat inamical – pléonasme – ne demanderont pas de comptes à leur « allié » ukrainien, à leur « allié » américain, ils ne convoqueront pas d'ambassadeur , n'exigeront aucun accès à aucun dossier ni ne suspendront aucune aide : ils se contenteront de la dénégation officielle. La vérité arrive trop tard, les peuples qui ont vu les factures d’électricité et de gaz exploser, les entreprises en difficulté, ont oublié et ne demanderont pas non plus de compte : ils sont fatigués, ils ont peur de la guerre, ils sont encore aux jeux olympiques… La nouvelle fera quelques titres deux jours et on passera à autre chose. Elle est pourtant géopolitiquement essentielle, par ce qu’elle nous apprend de nos alliances, des mensonges du Pouvoir, de la complicité des médias.

Pour ces derniers, je n’ai lu dans la presse française aucun mea culpa. Aucun retour sur les discours d’alors. Qui aura en France le courage de l’éditorialiste du Corriere delle Sera, ce 16 août ?

https://www.corriere.it/oriente-occidente-federico-rampini/24_agosto_16/nord-stream-verita-ucraina-966d1a5b-a3d7-4bad-a1a1-3dc96104exlk.shtml

« Nord Stream : le mensonge de l’Ukraine est une leçon pour nous ».

Pour Federico Rampini, pas question de changer nos alliances politiques, cette vérité ne remet rien en cause – admettons… – mais « confirmer notre appui à. Kiev ne veut pas dire se taire sur ses crimes ». Il salue le travail des enquêteurs allemands qui ont suivi les pistes du Wall Street journal publiées dès le printemps 2023 (attentat en octobre 2022), et il entame son autocritique en tant que journaliste qui reconnaît (!) qu’il ne peut y avoir le Mal et le Bien en entier seulement d’un côté. Il rappelle les propos d’un général allemand qui dit que si le responsable avait été un pays ennemi et non « ami », l’OTAN aurait dû activer l’article 5 et entrer en guerre contre son auteur. En tant que journaliste, il reprend ses écrits d’octobre 2022 et reconnait avoir eu tort d’écrire que « contre la piste ukrainienne, il y avait le dissuasif de la transparence démocratique »… Il reconnaît aujourd’hui que l’Ukraine a menti… assez longtemps pour que quand la vérité vient enfin à se savoir elle apparaisse sans intérêt.

Pour moi, c’est exactement ainsi que fonctionnent les narratifs dans lesquels l’information se trouve aujourd’hui insérée, celui du Covid en sont temps, celui de la Russie et celui de l’urgence climatique mise à toutes les sauces, y compris les plus incongrues. Ils jouent leur rôle mensonger et quand la vérité arrive parfois, il est trop tard. Les gens acceptent alors d’avoir été bernés. Vraie faillite démocratique quand il faudrait demander des comptes. Au contraire !

3. La vérité reste au sous-sol

Un des moyens que les médias ont trouvé est de ne pas traiter d’un sujet. Quand on ne peut pas ne pas en parler (Nord Stream), on l’insère dans un narratif préconstruit qui a peu à voir avec la recherche de la vérité. Quand on peut éviter d’en parler, c’est encore mieux : ce dont la presse mainstream ne parle pas N’EXISTE PAS. Tout simplement.

Les deux exemples les plus frappants ces derniers mois sont le procès d’Ursula von der Leyen par la justice belge, et la publication en Allemagne des dossiers de la gestion Covid par le Robert Koch Institut censé éclairer les décisions du gouvernement. Silence total en France.

Sur le premier dossier, tapez dans Google actualités Audition/procès d’Ursula von der Leyen Liège. Vous trouverez un seul article de Marianne sur le sujet (l’hebdo a été interpelé directement par un « complotiste » qui a un réseau social : Marianne s’est fendu en réponse d’un article).

C’est tout. Aucune radio, aucune télévision, aucun périodique n’a considéré comme digne d’intérêt la convocation par la justice belge de la Présidente de la Commission à deux  mois de sa fin de mandat, à trois semaines des élections européennes.

https://www.lalibre.be/belgique/judiciaire/2024/05/17/plainte-dun-belge-contre-ursula-von-der-leyen-une-audience-sest-tenue-a-liege-ce-vendredi-UHFQYSXOJFDJPLAV44HWZZ7I4I/

« La chambre du conseil de Liège a remis vendredi au 6 décembre l'affaire concernant une plainte pénale déposée par un Belge auprès du parquet de Liège à l'encontre de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

Ce citoyen belge avait déposé une plainte en avril 2023 auprès du parquet de Liège pour "usurpation de fonctions et de titre", "destruction de documents publics" et "prise illégale d'intérêts et corruption".

Il reproche à la présidente de la Commission européenne d'avoir refusé de rendre publics des SMS échangés avec le patron de Pfizer, Albert Bourla, lors de la négociation d'un méga-contrat de vaccins. Cet accord portait sur l'achat de jusqu'à 1,8 milliard de doses de vaccin contre le Covid-19 à partir du printemps 2021 et estimé à l'époque à 35 milliards d'euros. »

L’audience a eu lieu le 24 mai 2024 au tribunal de Liège. Pour le citoyen français, elle n’a jamais existé. UVDL a été reconduite à la tête de la Commission : la veille, la Cour européenne de justice avait in extremis conclu à un manque de transparence de sa part dans les SMS Pfizer. Manque de transparence qui a coûté 35 milliards d’euros. Le casse du siècle ? Là encore, la vérité arrivait par l’escalier, trop tard pour ébranler sa reconduction comme chef de l'exécutif, nomination et non vote. Espérons que la justice belge la fasse éclater le 6 décembre et que les citoyens français en soient informés.

Le second cas concerne le Robert Koch Institute, équivalent allemand de l’Institut Pasteur. Il conseillait le gouvernement allemand pendant la crise covid. En mars 2023, la justice allemande, saisie par un « complotiste » a obligé l’institut à publier ses documents internes. La publication a d’abord été faite mais avec de larges pages passées au noir. Elle révélait déjà le fait que le pouvoir avait pris ses décisions contre l’avis du RKI. Que dans le couple Pouvoir- Savoir, c’est le premier qui menait le bal, contrairement à ce qui était affiché.  Un deuxième jugement en juillet 2024 a obligé une publication intégrale cette fois. En Allemagne, les effets sont ravageurs.

Voici quelques titres du Berliner Zeitung qui n'est pas, a priori, le plus marginal des quotidiens allemands, titres traduits (maladroitement) par mon Google qui m'offre cette option et me permet de lire les articles. Pêchés de frais ce jour ici, avec le lien pour les germanophones qui voudront voir les originaux https://www.berliner-zeitung.de/topics/rki-files :

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