1. Que dit réellement cette étude Epi-phare ?
Publiée le 4 décembre 2025, l'étude porte sur 22,7 millions de vaccinés et 5,9 millions de non-vaccinés, âgés de 18 à 59 ans, suivis sur 45 mois en médiane. Les résultats montrent que les personnes vaccinées présentent un risque de décès pour COVID-19 hospitalisé réduit de 74% et un risque de décès toute cause réduit de 25% comparé aux non-vaccinés.
Les points forts de l'étude
Il faut le reconnaître : l'ampleur de cette étude est impressionnante, avec près de 28 millions de participants suivis sur une durée médiane de 45 mois. La méthodologie utilise des modèles statistiques sophistiqués, pondérés par l'inverse du score de propension, et prend en compte 41 comorbidités. C'est un travail rigoureux dans son périmètre.
Les limites qu'il faut souligner
a. Une tranche d'âge très restreinte : 18-59 ans
L'étude exclut d'emblée deux populations cruciales : les enfants et les personnes de plus de 60 ans. Or, ces dernières ont été les plus touchées par les décès et les effets secondaires graves. Où sont les données sur les plus de 60 ans, les plus vulnérables face au COVID ? Où sont les données sur les enfants, pour qui le rapport bénéfice-risque a toujours été plus discutable ?
b. Un seul critère : la mortalité
L'étude se concentre uniquement sur les décès. Mais qu'en est-il des autres effets secondaires, ceux qui ne tuent pas mais qui altèrent durablement la vie ? Les centaines de milliers de signalements concernant les troubles menstruels et les interrogations sur la fertilité ? Les myocardites et péricardites, particulièrement chez les jeunes hommes ? Les symptômes s'apparentant au COVID long post-vaccinal ? Ces effets indésirables, pourtant largement documentés dans les bases de pharmacovigilance, ne sont pas abordés ici.
c. La temporalité : un suivi commençant 6 mois après vaccination
L'étude indique explicitement : « Le suivi a débuté 6 mois après la date index dans les deux groupes afin d'éviter un biais de temps immortel. » En d'autres termes, les décès survenus dans les six premiers mois suivant la vaccination ne sont pas comptabilisés dans l'analyse principale. Une sous-étude examine certes la mortalité à court terme, montrant une réduction de 29% dans les 6 premiers mois, mais cette période cruciale – celle où surviennent justement les effets indésirables immédiats – mérite une attention particulière et transparente.
Qu'en est-il des accidents cardiovasculaires dans les jours ou semaines suivant l'injection ? Des myocardites fulminantes qui ont touché certains jeunes ? Cette fenêtre temporelle de 6 mois pose question.
d. Le contexte international : des signaux d'alerte qui persistent
Pendant que l'étude Epi-phare est publiée, un mémo interne de la FDA aux États-Unis fait surface fin novembre 2025. Signé par Vinay Prasad, responsable de la division vaccins de l'agence, ce document affirme qu'au moins 10 enfants seraient décédés « après et à cause de » la vaccination COVID, suite à une réanalyse de 96 cas de décès rapportés dans la base VAERS entre 2021 et 2024.
Certes, ce mémo est controversé : il ne fournit pas de données détaillées, s'appuie sur VAERS (un système de signalement non vérifié), et de nombreux experts remettent en question ses conclusions. Mais il révèle que la FDA envisage de modifier ses normes d'évaluation des vaccins, exigeant des essais plus rigoureux. Cela reflète l'ampleur de la remise en question de certaines garanties de sécurité au sein même des autorités sanitaires américaines.
Sans conclure que le vaccin tue, il faut se garder de cocoricos imprudents. La science progresse par le doute et la vérification, pas par des déclarations de victoire définitive.
2. Ce que révèle la communication autour de l'étude
Prenons l'exemple de l'article de Laurent Joffrin, journaliste central de la pensée mainstream, ancien directeur de Libération, du Nouvel Observateur et fondateur de Regards. Son édito du 6 décembre 2025, « Le crime des antivax », est révélateur. Dans les jours qui viennent vous lirez et entendrez une foule de choses sans doute. Dont plusieurs pourraient être dans cette veine !
La violence du propos
Dès l'introduction, Joffrin pose les termes :
« Arrive un moment où il faut dire les choses comme elles sont, seraient-elles abruptes : les antivax et leurs épigones sont des criminels. Criminels, ceux qui ont mené campagne, aux temps du Covid, contre les vaccins ARN découverts par les chercheurs et diffusés par les autorités politiques, dont ils ont méthodiquement contesté la légitimité sans aucune base rationnelle. Criminels, les turlupins qui ont voulu gagner de la notoriété en se posant en dissidents de la "bien-pensance". »
Il poursuit avec cette charge :
« Autrement dit, ce vaccin ARN, contesté par une bande de faux experts et de vrais escrocs de la science, a sauvé des millions de personnes à travers le monde. Autrement dit, les polémiques criminelles soutenues par Raoult et ses hommes de main, le professeur Perrone et ses complices, et quelques autres charlatans de la médecine "non-officielle", en dissuadant une bonne partie de la population de recourir à la vaccination contre le Covid, ont provoqué la mort de centaines de milliers de personnes. Crime de masse auxquels ont concouru quelques hurluberlus en mal de reconnaissance, tels Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France, ou le chanteur farfelu Francis Lalanne. »
Et il conclut ainsi :
« Criminels, enfin, les médias qui ont légitimé cette contestation de la science au nom d'une soi-disant contestation des "élites", en tête desquelles on trouve une fois encore la chaîne bolloréenne CNews. Ils sont responsables de la mort de milliers de leurs compatriotes assez gogos pour les croire sur parole et refuser le vaccin qui aurait pu réduire leur vulnérabilité. Reste une question essentielle : ces imbéciles solennels, qui ont sciemment trompé le public dans une affaire de vie ou de mort, devront-ils, ou non, répondre de leurs actes ? »
Le vocabulaire est sans appel : « criminels », « turlupins », « faux experts », « vrais escrocs », « charlatans », « hurluberlus », « imbéciles solennels », « gogos ». Et la question finale : devront-ils « répondre de leurs actes » ?
Une généralisation abusive
L'étude Epi-phare ne concerne que les décès et une tranche d'âge de 18 à 59 ans. Pourtant, Joffrin l'utilise comme si elle levait définitivement tous les doutes, sur tous les effets, pour toutes les populations, et pour toujours. L'étude ne dit rien de ce qui se passera dans 10 ans, rien sur les enfants, rien sur les plus de 60 ans, rien sur les effets secondaires non mortels.
Le soulagement qui révèle le doute d'hier
« On avait raison ! Les antivax avaient tout faux », triomphe en substance Joffrin. Ce soulagement en dit long : on ne savait donc rien avec certitude à l'époque. Pourtant, le ministre de la Santé Olivier Véran affirmait en 2021 : « On n'a jamais eu autant de recul sur un vaccin. »
Nous étions donc bien dans l'acte de foi, dans une soumission un peu aveugle au pouvoir, quand ceux qui ont été nommés beaucoup trop vite « antivax » voulaient juste un principe de précaution et la liberté de choix, le droit de disposer de leur propre corps.
L'absolution du pouvoir
Le plus troublant, c'est que Joffrin absout le pouvoir de tout ce qu'il a pu faire au nom du vaccin, comme si rien n’avait été discutable du point de vue de la politique générale. Quelques rappels ?
- Le passe sanitaire puis vaccinal, inutiles puisque le vaccin n'empêchait ni d'attraper ni de transmettre le virus mais politiquement dévastateurs ;
- Les mesures absurdes : plages « dynamiques », obligation de consommer debout dans les bars, etc. ;
- Les processus de bouc émissaire contre les dénommés « antivax » ; les condamnations sociales, les haines contre ceux qui ne se vaccinaient pas ;
Autant de procédés anti-démocratiques, liberticides, participant d'un gouvernement par la peur, d’une gouvernementalité pour moi (mais on pourra toujours discuter) assez nouvelle !
3. Ce qui (me) fait vraiment peur
En matière de pratique démocratique et de vivre-ensemble, ce qui me fait le plus peur (mais nous avons tous nos lubies et nos seuils d’acceptation !), c'est de voir Joffrin rester exactement dans le même esprit, demander encore que « des têtes tombent », que des gens payent pour des... « crimes ». Fouquier-Tinville de la Macronie finissante… On parle bien de centrisme pour ces gens ?
Mais alors suivons-le, demandons des comptes au ministère de la Santé qui a laissé les gens chez eux dans les premières semaines, interdisant de prendre autre chose que du doliprane – surtout aucun antiviral connu ni surtout aucun anti-inflammatoire alors que les problèmes venaient de réaction inflammatoires incontrôlées (les orages cytokiniques qui conduisaient à des … détresses respiratoires aigües précisément !) – jusqu'à ce que des surinfections s'installent chez les plus faibles, devant aller à l'hôpital pour des intubations qui... leur ont coûté la vie.
Demandons aussi des comptes pour les personnes dans les EHPAD à qui on a administré du Rivotril, un anxiolytique aux effets sédatifs puissants dont les effets étaient… la détresse respiratoire et qui a causé de nombreux décès, dans des conditions qui ont suscité de nombreuses interrogations.
Mais par souci de « concorde », je serais de ceux qui ne vont pas demander de comptes… mais qu’au moins des leçons soient tirées, des analyses, un brin d’auto-critique, non ? Pourtant, pour les chiens de garde comme Joffrin, la page n'est pas tournée, le combat continue...
Conclusion
L'étude Epi-phare est un travail scientifique sérieux dans son périmètre. Elle apporte des éléments rassurants sur la mortalité à moyen terme chez les 18-59 ans vaccinés. C'est une bonne nouvelle qu'il faut accueillir avec satisfaction. Mais prétendre qu'elle clôt définitivement le débat, qu'elle justifie rétroactivement toutes les mesures coercitives prises pendant la crise, qu'elle légitime la violence du discours contre ceux qui ont exprimé des doutes, c'est faire un usage idéologique de la science.
La science avance par le questionnement, pas par l'anathème. Le débat démocratique se nourrit de doutes légitimes, pas de procès en sorcellerie. Et une société libre se construit sur le respect des libertés individuelles, pas sur la contrainte au nom d'une vérité déclarée unique et définitive.
Cinq ans après le début de la pandémie, il est temps non pas de chercher des coupables, mais de tirer les leçons – toutes les leçons – de ce que nous avons vécu collectivement. Et de continuer à analyser sereinement les données de ce passé récent pour ne pas recommencer les mêmes erreurs.